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La philosophie de Machiavel (AUDIO)
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Machiavel est-il le modèle de Poutine ?
Nicolas Machiavel vient inquiéter nos convictions. Machiavel n’est pas opposé à la désinformation. Il n’est pas opposé à la guerre. Et ce n’est pas juste un philosophe gangster, comme dit Leo Strauss. Machiavel est un auteur classique, il est au programme du bac français. Et Machiavel, contrairement à nous, pense qu’un bon dirigeant, ça viole la loi morale. Un bon dirigeant, ça doit mentir, ça doit faire la guerre, ça doit, comme il dit, entrer dans le mal.
Poutine, qui entre dans le mal, est peut-être un bon dirigeant. Et au contraire, un président moral serait un mauvais dirigeant. Un dirigeant qui se ferait marcher sur les pieds, qui se ferait renverser à la première occasion, perdrait des territoires, autoriserait l’instabilité politique, ce qui est bien pire que de tuer quelques opposants.
Voilà ce que pense Machiavel, et son modèle, c’est César Borgia. Il dit sur Borgia : « C’est à sa cruauté qu’il dut l’avantage de réunir la Romagne à ses Etats, et de rétablir dans cette province la paix et la tranquillité dont elle était privée depuis longtemps. Tout bien considéré, on avouera que ce prince fut plus humain que le peuple de Florence qui, pour éviter de paraître cruel, laissa détruire Pistoia. ».
Et si on réfléchit bien, est-ce que nous, démocraties occidentales, ne sommes pas aussi machiavéliennes ? Ou machiavéliques, pour utiliser l’adjectif péjoratif associé à Machiavel ?
Il faut manipuler, il faut tricher avec la morale, et Machiavel en donne très clairement la raison : « Un homme qui veut être parfaitement honnête au milieu de gens malhonnêtes ne peut manquer de périr tôt ou tard. »
Mais alors, si d’un côté on déteste le machiavélisme de Poutine et d’un autre côté, on pratique nous-mêmes le machiavélisme, où se situe la limite ?
Machiavel fait partie de ces philosophes, comme Aristote, qui partent du réel. Et il n’est pas en train d’inventer une utopie. L’utopioe, c’est ce que construit Platon dans la République. Il décrit ce que serait la Cité parfaitement conforme à la nature des homme. Une Cité qui évidemment n’a jamais existé. Platon a essayé de l’installer en Sicile, à Syracuse, mais ça a évidemment mal tourné. Platon a fini par être capturé et vendu comme esclave.
L’utopie, c’est aussi le titre du livre de Thomas More, Utopia. Machiavel se moque des utopies : « Beaucoup se sont imaginé des républiques et des principautés que nul n’a jamais vu ni connu. » Machiavel, c’est un pragmatique, c’est l’ancêtre de ceux qui n’aiment pas la philosophie dans les nuages. Ce qui devrait être ne l’intéresse pas. Il s’intéresse à ce qui est. Qu’est-ce qui est ? Qu’est-ce que ne veulent pas voir les idéalistes ?
« Quiconque veut fonder un Etat et lui donner des lois doit supposer d’avance les hommes méchants. » Les hommes sont méchants, voilà la vérité. « Des hommes, en effet, on peut dire généralement ceci : qu’ils sont ingrats, changeants, simulateurs et dissimulateurs, ennemis des dangers, avides de gain ».
Il ne faut pas changer l’homme, il faut le gouverner en tenant compte de ce qu’il est. On ne peut pas compter sur l’aspiration vers le bien. Il faut utiliser ce qui marche. Et qu’est-ce qui marche ? Les affects sont les leviers pour gouverner un peuple. Lesquels ? Il y en a deux principaux : la sympathie et la crainte : le Prince doit être aimé et il doit être craint.
Pourquoi être aimé ? Parce que c’est compliqué de gouverner quand on est haï. Comment l’être? En présentant l’apparence de la vertu. « Il n’est pas nécessaire à un prince d’avoir toutes les bonnes qualités, mais il lui est nécessaire de paraître les avoir. J’ose même dire que s’il les avait effectivement, et s’il les montrait toujours dans sa conduite, elles pourraient lui nuire, au lieu qu’il lui est toujours utile d’en avoir l’apparence.»
L’autre levier c’est la crainte. Etre aimé ne suffit pas, il faut aussi être craint. Qu’est-ce qui est le plus important ? Etre craint : « la raison en est que l’amitié étant un lien simplement moral de reconnaissance ne peut tenir contre les calculs de l’intérêt, au lieu que la crainte a pour base un châtiment dont l’idée reste toujours vivante. »
Faut-il être toujours cruel ? Non. Il faut l’éviter tant que possible, mais ne pas hésiter quand c’est nécessaire. Tout l’art, c’est de rester dans cette dualité. « Il faut savoir qu’il y a deux manières de combattre, l’une par les lois, l’autre par la force : la première sorte est propre aux hommes, la seconde propre aux bêtes ; mais comme la première bien souvent ne suffit pas, il faut recourir à la seconde. C’est pourquoi il est nécessaire au Prince de bien savoir user de la bête et de l’homme. » De quelles bêtes parle Machiavel ? Il y en a deux, le renard et le lion. « Le lion ne peut se défendre des pièges, le renard des loups ; il faut donc être renard pour connaître les pièges et lion pour faire peur aux loups. »
Nicolas Machiavel vient inquiéter nos convictions. Machiavel n’est pas opposé à la désinformation. Il n’est pas opposé à la guerre. Et ce n’est pas juste un philosophe gangster, comme dit Leo Strauss. Machiavel est un auteur classique, il est au programme du bac français. Et Machiavel, contrairement à nous, pense qu’un bon dirigeant, ça viole la loi morale. Un bon dirigeant, ça doit mentir, ça doit faire la guerre, ça doit, comme il dit, entrer dans le mal.
Poutine, qui entre dans le mal, est peut-être un bon dirigeant. Et au contraire, un président moral serait un mauvais dirigeant. Un dirigeant qui se ferait marcher sur les pieds, qui se ferait renverser à la première occasion, perdrait des territoires, autoriserait l’instabilité politique, ce qui est bien pire que de tuer quelques opposants.
Voilà ce que pense Machiavel, et son modèle, c’est César Borgia. Il dit sur Borgia : « C’est à sa cruauté qu’il dut l’avantage de réunir la Romagne à ses Etats, et de rétablir dans cette province la paix et la tranquillité dont elle était privée depuis longtemps. Tout bien considéré, on avouera que ce prince fut plus humain que le peuple de Florence qui, pour éviter de paraître cruel, laissa détruire Pistoia. ».
Et si on réfléchit bien, est-ce que nous, démocraties occidentales, ne sommes pas aussi machiavéliennes ? Ou machiavéliques, pour utiliser l’adjectif péjoratif associé à Machiavel ?
Il faut manipuler, il faut tricher avec la morale, et Machiavel en donne très clairement la raison : « Un homme qui veut être parfaitement honnête au milieu de gens malhonnêtes ne peut manquer de périr tôt ou tard. »
Mais alors, si d’un côté on déteste le machiavélisme de Poutine et d’un autre côté, on pratique nous-mêmes le machiavélisme, où se situe la limite ?
Machiavel fait partie de ces philosophes, comme Aristote, qui partent du réel. Et il n’est pas en train d’inventer une utopie. L’utopioe, c’est ce que construit Platon dans la République. Il décrit ce que serait la Cité parfaitement conforme à la nature des homme. Une Cité qui évidemment n’a jamais existé. Platon a essayé de l’installer en Sicile, à Syracuse, mais ça a évidemment mal tourné. Platon a fini par être capturé et vendu comme esclave.
L’utopie, c’est aussi le titre du livre de Thomas More, Utopia. Machiavel se moque des utopies : « Beaucoup se sont imaginé des républiques et des principautés que nul n’a jamais vu ni connu. » Machiavel, c’est un pragmatique, c’est l’ancêtre de ceux qui n’aiment pas la philosophie dans les nuages. Ce qui devrait être ne l’intéresse pas. Il s’intéresse à ce qui est. Qu’est-ce qui est ? Qu’est-ce que ne veulent pas voir les idéalistes ?
« Quiconque veut fonder un Etat et lui donner des lois doit supposer d’avance les hommes méchants. » Les hommes sont méchants, voilà la vérité. « Des hommes, en effet, on peut dire généralement ceci : qu’ils sont ingrats, changeants, simulateurs et dissimulateurs, ennemis des dangers, avides de gain ».
Il ne faut pas changer l’homme, il faut le gouverner en tenant compte de ce qu’il est. On ne peut pas compter sur l’aspiration vers le bien. Il faut utiliser ce qui marche. Et qu’est-ce qui marche ? Les affects sont les leviers pour gouverner un peuple. Lesquels ? Il y en a deux principaux : la sympathie et la crainte : le Prince doit être aimé et il doit être craint.
Pourquoi être aimé ? Parce que c’est compliqué de gouverner quand on est haï. Comment l’être? En présentant l’apparence de la vertu. « Il n’est pas nécessaire à un prince d’avoir toutes les bonnes qualités, mais il lui est nécessaire de paraître les avoir. J’ose même dire que s’il les avait effectivement, et s’il les montrait toujours dans sa conduite, elles pourraient lui nuire, au lieu qu’il lui est toujours utile d’en avoir l’apparence.»
L’autre levier c’est la crainte. Etre aimé ne suffit pas, il faut aussi être craint. Qu’est-ce qui est le plus important ? Etre craint : « la raison en est que l’amitié étant un lien simplement moral de reconnaissance ne peut tenir contre les calculs de l’intérêt, au lieu que la crainte a pour base un châtiment dont l’idée reste toujours vivante. »
Faut-il être toujours cruel ? Non. Il faut l’éviter tant que possible, mais ne pas hésiter quand c’est nécessaire. Tout l’art, c’est de rester dans cette dualité. « Il faut savoir qu’il y a deux manières de combattre, l’une par les lois, l’autre par la force : la première sorte est propre aux hommes, la seconde propre aux bêtes ; mais comme la première bien souvent ne suffit pas, il faut recourir à la seconde. C’est pourquoi il est nécessaire au Prince de bien savoir user de la bête et de l’homme. » De quelles bêtes parle Machiavel ? Il y en a deux, le renard et le lion. « Le lion ne peut se défendre des pièges, le renard des loups ; il faut donc être renard pour connaître les pièges et lion pour faire peur aux loups. »
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