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le troupeau

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I..
Regardant s’avancer à la diagonale invisible de l’altiplaine, le troupeau infini, dont la file coupe l’espace en deux parts,
Se dirigeant vers l’abreuvoir, les unes derrière les autres, sans empressement, sur une ligne précise dont elles ne dévient pas –
Avançant obliquement vers le centre de la plaine d’un même pas,
Tandis que d’autres descendent en désordre des contreforts de la montagne,
se ranger,
Leur pelage est couleur de lait et de cendre – de porcelaine – et l’ombre est jetée à leur côté,
Tangage du cou, du museau, le même mouvement les relie les unes aux autres, avançant semblablement, avec la même hâte, la même sûreté,
Par hochements de têtes, mouvements des épaules, de la poitrine – l’ondulation élastique et noble des bêtes !
Tirées par l’assaut lointain – inaudible – et l’écho d’un soufflement primordial,
A l’oblique devant moi, qui demeure immobile, ne voulant franchir la large Portée qui les conduit,
Parmi elles l’immense Taureau blanc, aux épaules demesurées, à l’encolure de géant, de dieu oublié,
II.
Ce pas – ce pas ! Comme roulent à l’essieu des épaules, entraînant celui des cuisses,
les muscles – d’un flanc à l’autre – ces pas – ô ce ressort tendu qui secoue tout le ventre de la bête !
Puis se relache et s’enroule à nouveau !
III.
Montée à leurs épaules, à leurs têtes oscillantes et raides, s’ouvre la terre profonde qu’elles franchissent,
Ne quittant pas des yeux la source sonore qu’elles abreuvent
De meuglements inquiets, demeurant alignées depuis le piémont arrondi
des collines
Jusqu’à l’eau retenue dans les auges de ciment – l’eau qu’elles fouillent,
Et l’herbe est foulée comme une grande paille pluvieuse…
IV.
Je ne puis voir où s’achève la procession, à l’horizon confondu avec l’ombre répandue par les épaules des montagnes,
Les plis de l’étoffe s’étalent largement sur la terre –
la grande file tenue droite – vers l’horizon diminuée,
Devant moi l’écoulement ininterrompu – non le flot qui grossit, mais le trait inchangé qui s’étire,
L’inlassable roulement des têtes et des dos, la courroie des muscles, la flexion des cous – bêtes dispersées sur la ligne unique d’une portée tracée au-dessus des herbes dorées et dociles, des panicauts aux têtes barbelés, et bleues –
Du ciel qui dorera bientôt toutes végétations, commençant par les derniers blés,
V.
Le bruit s’effile, et dans le trait qui s’amuit, les taches claires, comme des osselets, se rapprochent, avant que le terme de la marche soit atteint,
J’ignore à quel endroit de la prairie qu’elles foulent et des chaumes
Elles ont cessé d’être de notre monde,
Ayant rejoint l’Ère – imperdue – d’où elles sont apparues –
Par un sillon qu’elles ont pénétré, qu’elles n’avaient pas quitté, devant mes pas,
La grande Diagonale tendue d’un bord à l’autre de la plaine,
Elles seules ayant entendu le Mufle d’ombre exhalant son meuglement,
et vu le grand Masque blanc qui les appellait en secouant ses cornes noires,
Ô patientes, détachées de l’espace et des aires profuses que nous avions foulés ensemble,
Venues d’avant le temps mis en grain,leur course noire sous la couleur noire
de l’orage
Regardant s’avancer à la diagonale invisible de l’altiplaine, le troupeau infini, dont la file coupe l’espace en deux parts,
Se dirigeant vers l’abreuvoir, les unes derrière les autres, sans empressement, sur une ligne précise dont elles ne dévient pas –
Avançant obliquement vers le centre de la plaine d’un même pas,
Tandis que d’autres descendent en désordre des contreforts de la montagne,
se ranger,
Leur pelage est couleur de lait et de cendre – de porcelaine – et l’ombre est jetée à leur côté,
Tangage du cou, du museau, le même mouvement les relie les unes aux autres, avançant semblablement, avec la même hâte, la même sûreté,
Par hochements de têtes, mouvements des épaules, de la poitrine – l’ondulation élastique et noble des bêtes !
Tirées par l’assaut lointain – inaudible – et l’écho d’un soufflement primordial,
A l’oblique devant moi, qui demeure immobile, ne voulant franchir la large Portée qui les conduit,
Parmi elles l’immense Taureau blanc, aux épaules demesurées, à l’encolure de géant, de dieu oublié,
II.
Ce pas – ce pas ! Comme roulent à l’essieu des épaules, entraînant celui des cuisses,
les muscles – d’un flanc à l’autre – ces pas – ô ce ressort tendu qui secoue tout le ventre de la bête !
Puis se relache et s’enroule à nouveau !
III.
Montée à leurs épaules, à leurs têtes oscillantes et raides, s’ouvre la terre profonde qu’elles franchissent,
Ne quittant pas des yeux la source sonore qu’elles abreuvent
De meuglements inquiets, demeurant alignées depuis le piémont arrondi
des collines
Jusqu’à l’eau retenue dans les auges de ciment – l’eau qu’elles fouillent,
Et l’herbe est foulée comme une grande paille pluvieuse…
IV.
Je ne puis voir où s’achève la procession, à l’horizon confondu avec l’ombre répandue par les épaules des montagnes,
Les plis de l’étoffe s’étalent largement sur la terre –
la grande file tenue droite – vers l’horizon diminuée,
Devant moi l’écoulement ininterrompu – non le flot qui grossit, mais le trait inchangé qui s’étire,
L’inlassable roulement des têtes et des dos, la courroie des muscles, la flexion des cous – bêtes dispersées sur la ligne unique d’une portée tracée au-dessus des herbes dorées et dociles, des panicauts aux têtes barbelés, et bleues –
Du ciel qui dorera bientôt toutes végétations, commençant par les derniers blés,
V.
Le bruit s’effile, et dans le trait qui s’amuit, les taches claires, comme des osselets, se rapprochent, avant que le terme de la marche soit atteint,
J’ignore à quel endroit de la prairie qu’elles foulent et des chaumes
Elles ont cessé d’être de notre monde,
Ayant rejoint l’Ère – imperdue – d’où elles sont apparues –
Par un sillon qu’elles ont pénétré, qu’elles n’avaient pas quitté, devant mes pas,
La grande Diagonale tendue d’un bord à l’autre de la plaine,
Elles seules ayant entendu le Mufle d’ombre exhalant son meuglement,
et vu le grand Masque blanc qui les appellait en secouant ses cornes noires,
Ô patientes, détachées de l’espace et des aires profuses que nous avions foulés ensemble,
Venues d’avant le temps mis en grain,leur course noire sous la couleur noire
de l’orage